Suite au virage révolutionnaire des manifestations et de la grève générale décrétée à Petrograd, le pouvoir du tsar Nicolas II vacille en quelques jours seulement tandis que l’agitation s’étend jusqu’à Moscou et sur les arrières de l’armée impériale.

Le 12 mars 1917, plusieurs dirigeants des différents partis révolutionnaires (Bolcheviks, Mencheviks et Sociaux-Révolutionnaires) se réunissent à Petrograd, au palais Tauride, alors que leurs partisans ne font qu’accompagner le mouvement populaire spontané qui s’est formé dans la ville. La veille encore, Shliapnikov, le patron des Bolcheviks de Petrograd déclarait à des socialistes réunis dans l’appartement de Kerenski, leader du parti Social-Révolutionnaire (SR) : “Il n’y a et il n’y aura pas de révolution. Nous devons nous préparer à une longue période de réaction.” La réunion du 12 aboutit néanmoins à la création d’un Comité exécutif provisoire des députés ouvriers qui entrera dans l’Histoire sous le nom de “Soviet de Petrograd” et qui est alors dirigé par le menchevik géorgien Nicolas Tchéidzé, tandis que Kerenski l’assiste comme vice-président. Le Soviet comprend 6 Mencheviks, 2 Bolcheviks, 2 Sociaux-Révolutionnaires et 5 indépendants. 600 délégués issus des rangs ouvriers et des mutins de l’armée seront élus le lendemain. L’une des premières mesures prises par ce Soviet consiste à éditer un journal pour porter les idées révolutionnaires : Izvestiia. A l’autre bout de la ville, le même jour, des députés de la Douma, le parlement russe, forme un autre comité : le Comité provisoire pour le rétablissement de l’ordre gouvernemental et public”. Dès lors, les deux comités vont tenter de s’entendre malgré leurs divergences de vue sur le type de programme politique à mettre en oeuvre. Le Soviet reconnaît la légitimité du gouvernement provisoire afin de soutenir la mise en oeuvre d’une vaste démocratisation du pays. Dans le même temps, la contestation gagne Moscou où la grève générale est décrétée et où là aussi est élu un Comité révolutionnaire provisoire.

Le Soviet de Petrograd

Les 13 et 14 mars, devant la tournure des événements et refusant de faire marcher la troupe contre Petrograd, la STAVKA, l’état-major de l’armée impérial pousse l’héritier de la dynastie des Romanov à abdiquer pour “sauver l’indépendance du pays et assurer la sauvegarde de la dynastie.” Le général Alekseïev qui dirige la STAVKA est soutenu par l’ensemble des généraux en charge des différents fronts, dont le populaire général Broussilov qui est convaincu que l’abdication est la seule solution pour restaurer l’ordre sur les arrières de l’armée russe et poursuivre le combat contre l’Allemagne. Nicolas II qui est alors dans son train spécial, reçoit ces informations par télégrammes. Dans le même temps, son oncle, le grand-duc Nicolaï, implore son neveu “à genoux” d’abdiquer. Le 15 mars, à 3h05, Nicolas II informe son entourage de sa décision : il abdique en faveur de son fils Alexis, se signe, suivit dans ce geste par les généraux qui l’entourent. La dynastie des Romanov qui règnait depuis 1613 sur “toutes les Russies” n’est plus.

SYLVAIN FERREIRA