Le 1er juillet 1917, malgré un délai de préparation très court, les troupes russes commandées par Broussilov passent à l’offensive en direction de Lemberg (Lviv). Assommées par l’artillerie russe, les troupes austro-hongroises cèdent.

Le bombardement russe est le plus impressionnant depuis le début de la guerre. Concentrés sur un front de 48 km, les soldats russes s’élancent sous les yeux de Kerenski venu en personne galvaniser les troupes. De manière symbolique, il a même donné l’ordre d’assaut depuis une tranchée de première ligne. A de nombreuses reprises il se placera en première ligne pour convaincre certaines unités réticentes de passer à l’assaut et son exemplarité aura à chaque fois un effet positif sur les récalcitrants. La première journée de l’offensive est donc un franc succès. Les troupes russes, et notamment les unités de choc du général Kornilov, s’emparent d’un important point de résistance près de Brzezany et font plus de 10 000 prisonniers dont beaucoup d’Allemands à la grande satisfaction des Russes. La IIe armée austro-hongroise s’est effondrée sous le choc initial et une immense brèche de 45 km de long sur 32 km de profondeur apparaît dans le dispositif ennemi. L’avance se poursuit alors jusqu’à Halicz sur le Dniestr. Les pointes russes installent même des têtes de pont sur la Lommica et se retrouvent à 80 km de leur objectif Lemberg. Au sud, la reconquête de la Bukovine permet à l’armée d’atteindre les contreforts des Carpathes.

Devant ce succès initial, les observateurs pensent que Broussilov est en train de rejouer – en mieux – l’offensive de l’année précédente. Mais le 19 juillet, le groupe d’armée sud allemand fort de neuf divisions allemandes et deux divisions austro-hongroises lancent une puissance contre-attaque pour regagner le terrain perdu. Affaiblis après plus de deux semaines d’offensive et parfois à court de ravitaillement, les Russes sont partout repoussés et parfois les unités s’enfuient dans un chaos indescriptible. Broussilov, malade et diminué, doit ordonner la retraite générale. A la fin juillet, les Russes sont revenus sur leurs positions de départ. L’offensive allemande ne s’arrête que parce que leurs lignes de ravitaillement sont trop étendues. Les Russes ont perdu plus de 40 000 hommes en un mois tandis que les pertes des puissances centrales s’élèvent à 12 500 hommes tués ou blessés sans compter les prisonniers. Devant cet échec, Kerenski est contraint de limoger un Broussilov à bout pour le remplacer par le général monarchiste Kornilov. Celui-ci n’hésite pas à recourir aux mêmes brutales de l’armée tsariste, notamment la peine de mort, pour tenter d’endiguer la crise morale qui frappe de nouveau l’armée russe. Cela aura un effet contre-productif qui anéantira les derniers espoirs du gouvernement provisoire de poursuivre la guerre et scellera son sort quelques mois plus tard lors de la Révolution d’Octobre.

SYLVAIN FERREIRA