A la fin de l’année 1914, les Allemands constatent que les moyens d’assaut des tranchées à disposition de l’infanterie sont limités et que le nettoyage des celles-ci avec pour seule arme un fusil à baïonnette est extrêment difficile. De plus, une fois la première ligne adverse conquise, l’infanterie se retrouve démunie en terme de puissance de feu pour attaquer la seconde ligne, et surtout pour faire face aux mitrailleuses et canons légers adverses.

Si les unités du Génie sont les premières à proposer de soutenir les vagues d’infanterie avec les premiers lance-flammes (la première unité est créée le 18 janvier 1915), d’autres officiers issus d’autres armes se montrent inventifs pour trouver des solutions. Selon l’avis du lieutenant-colonel Max Bauer, expert de l’artillerie de siège, il faudrait doter l’infanterie de canons légers transportables à travers le no man’s land pour apporter un soutien efficace à l’infanterie dans ses assauts. Il propose à cet effet d’utiliser le nouveau canon de 3,7 cm récent développé par Krupp. Très influent auprès du Grand Etat-Major (OHL), Bauer obtient du Ministre de la Guerre la mise sur pied d’une unité spéciale pour tester ce nouvel équipement (et d’autres).

Flammen II

Un lance-flammes allemand à l’entraînement.

Le 2 mars 1915, le Ministre décrète la création d’un détachement d’assaut (Sturmabteilung) au sein de la VIIIe armée. Les hommes de cette nouvelle unité sont issus du Génie. Dans le cours du mois de mars l’unité est rassemblée au pas de tir d’artillerie de Wahn. Elle comporte un quartier-général, deux compagnies de sapeurs, une batterie de 20 pièces du nouveau canon Krupp. Elle est placée sous le commandement du Major Calsow, un sapeur. La batterie s’entraîne intensivement jusqu’en mai sur la pièce de 3,7 cm que les hommes baptisent rapidement Sturmkanone (canon d’assaut). La formation ne se limite pas à l’emploi de cette arme et à son entretien. Les sapeurs développent aussi des techniques qui garantissent de pouvoir le déplacer dans l’univers bouleversé du no man’s land. Les deux compagnies de sapeurs continuent de s’entraîner à la destruction des réseaux de barbelés mais aussi à l’utilisation de boucliers de protection en acier sensés les protéger.

Rohr

Le capitaine Willy Rohr.

Malheureusement, cet entraînement intensif ne porte pas immédiatement ses fruits puisque le Sturmabteilung est utilisé à contre-emploi pour défendre une tranchée de première ligne en France début juin comme de simples fantassins. Les canons, placés derrière la première ligne, sont eux aussi utilisés sans inventivité comme de simples armes de soutien. Cette première expérience ratée aboutit au mois d’août 1915 au « limogeage » du Major Calsow. Celui-ci proteste car il considère, à raison, que son unité n’a pas démérité mais qu’elle a simplement été mal utilisée. Il est remplacé par celui qui va entrer dans l’Histoire comme le véritable « père » de ce nouveau type de troupes : le capitaine Willy Rohr, originaire de Metz, qui s’est distingué comme commandant de la 3e compagnie du bataillon de fusiliers de la Garde au cours d’un raid audacieux le 31 décembre 1914 dans les Vosges.

(à suivre…)

SYLVAIN FERREIRA