Comme l’offensive Broussilov à l’Est, l’offensive franco-britannique sur la Somme fait partie d’un plan d’ensemble mis en place par les Alliés en décembre 1915 au cours de la conférence de Chantilly (cf. MAG n°9). Ce plan élaboré par Joffre vise à profiter de la supériorité manifeste des forces de l’Entente pour percer le front allemand en l’Ouest. L’offensive allemande sur Verdun depuis février vient néanmoins fortement perturber la donne.Initiallement, l’armée française doit jouer les premiers rôles dans cette opération et l’armée britannique (4e armée et la British Expeditionary Force, BEF) doit appuyer l’effort français sur le flanc nord. Les besoins en hommes et en matériel que requiert la bataille d’attrition de Verdun modifient le plan de Joffre dès le mois de mars. La Conférence de Paris, les 26 et 27 mars 1916, entérine l’idée d’une plus large participation de l’armée britannique aux ordres du général Haig, tout en réduisant le nombre de divisions françaises (6e armée Fayolle) du Groupe d’Armées Nord de Foch. Le 31 mai 1916, alors que la Ve armée allemande poursuit son offensive sur Verdun et que les besoins de l’armée française ne cessent d’augmenter, Joffre doit abandonner l’idée de percer le front allemand sur la Somme. L’offensive, à caractère désormais limitée, devra avant tout soulager le front de Verdun.

FAYOLLE

Le général Fayolle, commandant la 6e armée française.

Début juin, Fayolle dispose donc de 14 divisions d’infanterie réparties en 4 corps d’armée : le 20e au nord de la Somme, le Corps d’Armée Colonial (C.A.C) entre la Somme et Fay, le 35e au sud de Fay et le 2e corps en réserve d’armée. Ils ont pour objectif la ligne Maurepas/Hem/plateau de Flaucourt, soit 15 kilomètres de front. Pour préparer l’attaque et la soutenir, l’artillerie française aligne 732 pièces d’artillerie lourde dont 122 pièces d’artillerie lourde de grande puissance (ALGP) qui doivent assurer les tirs de contre-batterie pour museler l’artillerie allemande. A la demande de Foch, l’ALGP est placée au plus près du front pour pouvoir couvrir les secteurs qui seraient éventuellement conquis. L’approvisionnement en obus est impressionnant : 6 millions d’obus de 75, 2 millions pour l’artillerie lourde, et 400 000 pour les 1 100 mortiers de tranchées. Côté britannique, et malgré la lenteur des préparatifs de Haig, on aligne 26 divisions d’infanterie. Elles doivent conquérir la ligne Hébuterne/Miraumont/Le Sars/Flers/Ginchy/Guillemont, soit 25 kilomètres de front. Là aussi, la dotation en artillerie est importante : 868 pièces de campagne, 467 pièces lourdes respectivement dotés de 2 600 000 coups et 1 163 000 coups. Enfin, pour assurer le guidage des tirs de l’artillerie et soutenir l’avance des fantassins, les Alliés alignent 300 avions contre seulement 129 côté allemand. Avant le début de la préparation d’artillerie, le ciel est vidé des Drachen (saucisses et dirigeables allemands) qui servent à l’observation aérienne. Les aviateurs alliés sont maîtres du ciel.

Dépot de munitions français.

Impressionnant dépot d’obus français.

La IIe armée allemande, aux ordres du général Fritz von Below,  n’aligne que 8 divisions en première ligne (3 face aux Français et 5 face aux Britanniques) et 13 en réserve. Elle est soutenue par 454 pièces de campagne et 390 pièces d’artillerie lourde, soit moins du tiers de la puissance de feu déployée par les Alliés. Néanmoins, le système défensif dans lequel sont installées les Allemands est très bien organisé. Depuis les batailles de l’automne 1915, les Allemands ont aménagé une troisième ligne de défense à environ 2 700 mètres de la première. L’artillerie allemande a également organisé des barrages de secteur (Sperrfeuerstreifen) pour répondre rapidement à toute demande de soutien sur un secteur donné. Par ailleurs, des abris plus profonds ont été aménagés en première (Stutzpunktlinie) et deuxième ligne pour protéger les fantassins des bombardements. Seul défaut dans ce dispositif, les tranchées allemandes (sauf la troisième ligne), creusés dans un sol crayeux, sont installées principalement sur le versant de collines face aux positions alliées, ce qui facilite l’observation et le repérage pour les artilleurs. Le remblais de craie aux abords des tranchées les rend également très faciles à repérer pour les aviateurs.

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Photo aérienne de la redoute des Souabes dans le secteur de Thiepval.

Le 24 juin, l’artillerie alliée débute ses tirs de réglage et de démolition sur l’ensemble du front…

SYLVAIN FERREIRA