Sur certaines cartes postales de l’époque, il est indiqué : monument de Barcy,

mais le monument se situe bien sur le territoire de la commune de Chambry.

Il a été érigé par des soldats du génie, près de l’emplacement d’une ancienne tombe.

Ci-dessous, la route qui mène à Barcy, au loin, à gauche la ferme du Champ d’Asile, derrière celle-ci, la colline du hameau de Mansigny, où était positionnée une partie de l’artillerie française.

L’Illustration du 26 septembre 1914

C’est la tombe du jeune lieutenant du 3e Zouaves, Napoléon Poggi, 28 ans, né en Corse comme son illustre insulaire, l’empereur Napoléon 1er.

Le lieutenant résidait en Algérie, comme sa famille, son père étant docteur en droit, et avoué.

Un oncle était médecin en Corse.

Le lieutenant, est tombé le 7 septembre 1914, près de ce carrefour des Quatre-Routes.

(Après avoir prononcé les mots : « On les aura ! Vive la France ! », selon le témoignage en 1950, de Monsieur Amar, de la 45e Division d’Algérie).

Les régiments de Zouaves, dont le poste de commandement était à Penchard, ont durant la bataille, occupé les hauteurs, le village et le cimetière communal de Chambry, tentant au prix de lourdes pertes d’investir les lignes allemandes.

 Son corps, tout comme d’autre officiers tués au combat, sera exhumé par la suite, et emmené par la famille.

Le monument des Quatre routes (cliché 31 mars 1997)

Après la victoire de la Marne de septembre 1914, le général Gallieni, gouverneur militaire de Paris, projette d’élever un monument à la mémoire des officiers et soldats tombés sur ces champs de bataille.

Buste du général Gallieni.
(Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux).

A l’origine, cet ouvrage, selon les directives, devait être constitué de pierres provenant de différentes communes, dont les bâtiments ont été détruits par l’ennemi.

Pour une raison inconnue, mais disons plutôt rationnelle et pratique, ce ne sera pas

le cas.

Le monument aura la forme d’une pyramide tronquée, faite en pierre meulière.

Ville de Meaux, lettre du 10 novembre 1914, du maire Georges Lugol adressée au maire de Penchard.
Le monument en phase d’achèvement

L’inauguration est fixée au dimanche 12 septembre 1915.

Les autorités religieuses n’ont pas été invitées…

(La séparation de l’Eglise et de l’Etat ne datant que de décembre 1905).

Le dimanche 5 septembre 1915, une semaine précédant l’inauguration, a eu lieu

la commémoration du premier anniversaire de la bataille de la Marne, célébrée par Monseigneur Marbeau, en la cathédrale de Meaux.

L’évêque durant les journées de septembre 1914, a été d’un grand secours pour sa ville.

A l’issue de cette célébration, dans l’après-midi, les évêques de Meaux, Sens et Versailles, accompagnés des différentes associations et de particuliers, venus en pèlerinage sur les champs de bataille, ont malgré tout, car ardents patriotes,

déposé gerbes et drapeaux tricolores, devant le monument encore bâché.

Dimanche 5 septembre 1915, le monument paré de gerbes et de drapeaux,
une semaine avant son inauguration.

Mais dès 1916, les autorités religieuses, elles aussi, ayant payé un lourd tribut à la Nation, seront associées aux commémorations.

Le monument est inauguré le dimanche 12 septembre 1915, pour le premier anniversaire de la bataille de la Marne.

Monsieur Albert Dalimier, sous-secrétaire d’Etat, aux Beaux-Arts, représente le gouvernement français.

Il est accompagné de quelques délégués du Sénat, de la Chambre des députés,

et d’Adrien Mithouard, président du Conseil municipal de Paris.

Présents, bien sûr, le maire de Chambry Albert Leduc, son conseil municipal,

les habitants, les élus et représentants des autres communes, en tout plusieurs centaines de personnes sont rassemblées autour du monument.

A remarquer les présences comme symbole, de Monsieur Favre et son petit-fils,

qui avaient été emmenés par les Allemands, parmi les otages de Varreddes.

Eux, sont revenus, en février 1915, grâce à la Croix Rouge, du fait de leurs âges respectifs, des camps d’internement en Allemagne.

En septembre 1914, Désiré Favre 72 ans et son petit-fils René 13 ans, ont fait partie du groupe

des 17 otages de Varreddes, dont 10 malheureusement, ne reviendront pas…

Dimanche 12 septembre 1915
La route de Crégy-lès-Meaux qui mène au carrefour des Quatre-Routes.
On distingue le monument, au bout de la route, sur la droite.

Sur la face du monument, une plaque en marbre :

A la mémoire,

des soldats de l’Armée de Paris

Morts pour la Patrie

sur les champs de bataille de l’Ourcq

Septembre 1914

Pourquoi cette inscription dédiée à l’Armée de Paris, alors que sur le terrain, c’est la 6e Armée du général Maunoury qui a combattu ?

Le général Gallieni est le commandant du camp retranché de Paris et de son armée.

Pour défendre la capitale, ses troupes sont composées essentiellement de territoriaux, des réservistes âgés de 40 à 48 ans.

Les troupes mobilisées sont au front.

Mais cette 6e Armée du général Maunoury, après avoir retraité devant l’avance allemande, est positionnée à l’Est de Paris.

Elle est donc dans le rayon d’action, du camp retranché de Paris et ainsi sous l’autorité de Gallieni.

Gallieni, exerçant le commandant supérieur, va donc diriger la 6e Armée, en totale entente avec Maunoury.

Par des reconnaissances aériennes, Gallieni constate, le changement soudain,

de direction de l’armée allemande de Von Kluck, qui néglige Paris et se dirige

vers le Sud.

Il décide aussitôt d’attaquer le flanc de l’ennemi.

Véritable organisateur, il enverra même des renforts par taxis !

Par sa manœuvre, il va faire basculer, le sort de la bataille de la Marne.

(Son rôle très important, sera totalement minoré par le Grand Quartier Général français, pour ne pas faire ombrage au généralissime Joffre …).

Etant en arrière des lignes d’attaque de l’armée Maunoury, l’Armée de Paris n’a joué qu’un rôle mineur, mis à part quelques détachements de cavalerie de reconnaissance.

Par ce monument, Gallieni veut, valoriser, et à juste titre, le rôle actif et décisif, qu’il a rempli dans cette bataille, et rendre hommage à ses troupes, incluant l’armée Maunoury, pour avoir défendu et sauver Paris.

Derrière le monument une autre plaque en marbre :

Gloire à notre France éternelle

Gloire à ceux qui sont morts pour elle

Deux vers, extraits d’un recueil de poèmes de Victor Hugo publié en 1835,

le grand écrivain, étant alors âgé de 33 ans.

En 1835, Victor Hugo rend hommage à tous ceux qui sont morts pour la Patrie

et notamment les soldats de la Grande Armée, celle de Napoléon 1er.

Ces deux vers seront gravés sur de nombreux Monuments aux Morts.

12 septembre 1915 : Chambry, monument des Quatre-Routes.
De gauche à droite : au premier plan : Messieurs Mithouard président du Conseil de Paris
et Dalimier sous-secrétaire d’Etat aux Beaux-Arts.

Après l’inauguration officielle du 12 septembre 1915, les représentants de Paris, inaugureront ce même jour, à Etrépilly, un second monument, situé à l’entrée de la nécropole nationale française.

Inaugurations des monuments de Chambry puis d’Etrépilly

Depuis 1915 et jusqu’à nos jours, les commémorations perdurent, elles maintiennent ainsi, le devoir de mémoire.

Dimanche 13 septembre 2020.
(Les porte-drapeaux portent des masques de protection, en raison de l’épidémie du coronavirus).

Mise en Ligne : Jean-Michel DUSAULCY
Auteur : Raymond-Robert Pezant

Société des Amis du Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux