Petite histoire dans la Grande Histoire

La légion Américaine

Il y a quelques mois, j’ai eu la chance de rencontrer Jean-Claude MALTERRE, un expatrié vivant depuis de nombreuses années aux États-Unis. Jean-Claude avait tenu, lors de son dernier séjour en France, sa terre natale, à refaire traverser pour la troisième fois l’Atlantique à un drapeau américain. Si cette idée, comme ça, ne veut à priori rien dire, c’est l’extraordinaire histoire de cette « bannière étoilée » qui m’a interpellée au moment où nous finissions de commémorer le centenaire de la Grande Guerre et le 75ème anniversaire du débarquement en Normandie.

Petite histoire qui s’inscrit dans la grande Histoire, ce témoignage que je vous laisse découvrir, laisse à méditer sur les signes de la vie, les symboles, le sens du sacrifice et les liens fraternels qui nous unissent à tout jamais avec les États-Unis d’Amérique.

Patrice MORIN – SAM2G –


Témoignage
 
« Né en France occupée en février 1941, il importe que je témoigne.
 
Si je suis libre aujourd’hui, c’est en partie grâce au sacrifice ultime de plusieurs centaines de milliers de soldats français, dont mon grand-père paternel, morts pour la France dans la bataille de Verdun.  Mon grand-père était un simple soldat, originaire d’un petit village de la Creuse, qui fut tué devant Douaumont le 14 décembre 1916, après deux horribles années de souffrance dans les tranchées avec le 321ème régiment d’infanterie.  Ces sacrifices ne furent cependant pas suffisants pour terminer la guerre.
 
Si mon fils et moi sommes libres aujourd’hui, c’est aussi parce que des centaines de milliers de soldats de l’AEF (American Expeditionary Force) participèrent à l’offensive franco-américaine de septembre 1918 dans le secteur de Verdun.  Cette offensive, qui coûta la vie à 26.277 soldats d’Outre Atlantique, devait conduire à l’armistice du 11 novembre 1918. Parmi les survivants, un américain de Californie, gazé dans l’Argonne, rapporta fièrement en 1919 un modeste drapeau américain que son père lui avait remis avant son départ. Hélas, ni les sacrifices ultimes des uns ni les souffrances à vie de bien d’autres ne purent assurer une paix durable.
 
Si mes petits-enfants, mon fils et moi sommes libres aujourd’hui, c’est aussi parce que le fils de ce soldat californien traversa aussi l’Atlantique vingt-six ans plus tard avec, dans son paquetage, le drapeau que son père lui avait donné.  Ce drapeau toucha ainsi à nouveau le sol de France au matin du 6 juin 1944, sur une plage de Normandie appelée « Omaha Beach » où, dans cet effroyable « jour le plus long », périrent plus de 2.500 soldats américains. En décembre 1944, après la campagne de France, notre GI californien fut à nouveau durement éprouvé près de Bastogne, par l’anéantissement total de son unité dont il fut le seul survivant. Il participa ensuite à l’éprouvante expérience de la libération du camp de concentration de Buchenwald en avril 1945. De retour aux États-Unis, il ne parlera à personne de ces événements qu’il ne révélera à son fils que peu de temps avant de mourir.
 
Il y a ainsi des milliers de familles françaises, comme la mienne, qui sont libres aujourd’hui parce que des millions d’hommes et de femmes des États-Unis d’Amérique ont souffert la perte de centaines de milliers de vies humaines.  Soixante-mille-cinq-cent-onze de ces victimes de la première et de la seconde guerre mondiale reposent dans les onze cimetières américains de France.
 
Il y a aussi des millions de familles américaines qui sont libres aujourd’hui parce qu’à la fin du dix-huitième siècle, plusieurs dizaines de milliers de soldats français commandés par le Maréchal de Rochambeau et la flotte française sous les ordres de l’Amiral de Grasse ainsi que le Marquis de La Fayette, le « héros des deux mondes », permirent aux États-Unis d’Amérique de conquérir leur indépendance et de faire du symbole de leur drapeau, la « Bannière Étoilée », un témoignage concret de la liberté. »
 
  Jean-Claude MALTERRE – Tucson, Arizona, USA –

La bannière qui a franchi trois fois l’Atlantique

Ce parcours coïncide avec l’histoire de la Légion Américaine, une association des anciens combattants des Etats –Unis. Son siège est à Indianapolis, mais cette association est née à Paris, en mars 1919.

A cette époque, la guerre achevée en Europe, le quartier général de l’A.E.F. a demandé à ses officiers de suggérer des idées pour améliorer le moral des troupes. Un officier, le lieutenant-colonel Theodore (Ted) Roosevelt Jr., a proposé une organisation de vétérans. En 1919, ce groupe a formé un comité provisoire et a choisi plusieurs centaines de militaires qui avaient la confiance et le respect de l’armée entière ; Quand la première réunion d’organisation a eu lieu à Paris en mars 1919. Un groupe d’une vingtaine d’officiers américains des forces expéditionnaires en France se réuni au 14 rue Ernest Psichari dans le 7éme arrondissement.

La première réunion appelée caucus de Paris, a défini une constitution provisoire et proposé le nom « The American Legion ». Un comité a été créé afin de parfaire les travaux de l’organisation. Elle a considéré que chaque soldat des forces expéditionnaires devenait membre de l’American Legion.

Une deuxième réunion du comité s’est tenue en mai 1919 à Saint Louis. L’activité de la Légion Américaine est de défendre les droits et intérêts des vétérans, et également les pensions et avantages accordés aux combattants du premier conflit mondial.

Cette organisation ne compte pas moins de trois millions d’adhérents.

Le congrès et pèlerinage de la Légion en 1927.

En 1927 le président Gaston DOUMERGUE invite officiellement la Légion américaine en France pour y tenir son congrès. Les amis américains vont répondre à cette invitation avec enthousiasme. En effet se sont trois mille membres qui vont se rendre à ce congrès. La délégation sera sous les ordres du Général PERSHING et du commandeur général de l’American Légion Howard SERGE.

Le congrès va se tenir le 19 septembre 1927 au palais du Trocadéro.

Les américains arrivent le 16 septembre, cette visite n’est pas anodine ! On reçoit magistralement nos alliés. Le Maréchal FOCH commandant en chef des forces alliées du front ouest accueille les invités accompagnés de Paul PAINLEVE ministre de la guerre et André TARDIEU ministre des travaux publics.

La délégation se rend tout d’abord sur les hauts lieux du conflit en particulier à Douaumont.

Une grande revue militaire sur un parcours d’une dizaine de kilomètres est organisée dans Paris.

Fait unique les vétérans défilent sous l’Arc de Triomphe. La ville est pavoisée et le public acclame chaleureusement les hommes qui sont venus apporter leur aide durant la Grande Guerre.

Aux Invalides, le Président du Conseil Raymond POINCARE offre un banquet aux congressistes.

Des journées qui auront marquées l’amitié indéfectibles des deux nations.

Quelques souvenirs de cette visite

Les médailles du congrès