Dès juillet 1870, l’armée prussienne prend position sur la commune du Raincy (93) et y installe des batteries d’artillerie lourde visant à pilonner les positions françaises et les forts défendant la capitale. La voirie est totalement détériorée par les travaux et tous les arbres pouvant gêner les tirs sont abattus. Cette invasion prussienne a laissé des traces indélébiles aussi bien dans le paysage raincéen que dans les esprits et la première guerre mondiale n’a fait qu’amplifier le désarroi des habitants.

Déjà, dans la petite église Saint Louis, seul lieu de culte existant jusqu’alors, un ex-voto témoigne de la reconnaissance de la ville à la Vierge qui l’a protégée lors de la bataille de la Marne de septembre 1914.

Félix Nègre est nommé Curé-Doyen au Raincy en 1918. Peu après son arrivée, il reçoit un don très important du père d’une victime de la guerre, pour bâtir une église dédiée à la mémoire des soldats morts durant la Bataille de la Marne. Elle sera donc consacrée à la Vierge Marie, Notre-Dame de Consolation, en mémoire des victimes de la Grande Guerre. Pour les paroissiens, cela représente encore un témoignage de reconnaissance envers la Vierge qui a protégé la ville de l’invasion allemande le 8 septembre 1914 et un vitrail nommé « Souvenir de la victoire de l’Ourcq 1914 » va le rappeler.

On ne peut pas parler directement de ce vitrail sans donner quelques détails sur cette église révolutionnaire par sa construction :

Le projet des frères Perret architectes est retenu en 1922. L’église est uniquement en béton armé laissant le matériau à l’état brut, sur un terrain très étroit, donc sans transept, dégageant un parvis à l’est sur l’avenue principale de la ville et donc un chœur situé à l’est contrairement à la tradition catholique. Tout cela pour une construction rapide et un budget limité. Les parois latérales faites de claustras préfabriqués en béton et déclinés en cinq motifs (croix, losange barré, cercle, carré et rectangle) accueillent les vitraux et sont divisées en verrières.

Chaque verrière se compose d’une grande croix et d’un vitrail figuratif en son centre, sauf celle du chœur, constituée d’une immense croix bleue (couleur de la Vierge) et rouge (symbole du sang du Christ).       

Maurice Denis, grand peintre religieux, est l’auteur des scènes figuratives du centre des verrières, reproduites ensuite en vitraux par Marguerite Huré, maître-verrier. Pour diminuer les travaux de mise en plomb des figures, cette dernière a découpé les verres en carrés de 10 cm de côté, cette trame carrée s’interrompant pour les visages et les mains des personnages.

Ces vitraux sont consacrés à la vie de la Vierge Marie et celui qui nous intéresse plus particulièrement célèbre son intervention guidant les troupes françaises vers la victoire et faisant reculer les Allemands le 9 septembre 1914.

Description du vitrail :

En haut au centre, la Vierge Marie repoussant les Allemands ;

Au centre à gauche, les généraux Galliéni et Monoury devant les taxis de la Marne, réquisitionnés sur l’ordre de Galliéni (alors gouverneur militaire de Paris) pour transporter les renforts de troupes qui permirent au Général Monoury de remporter la victoire. Monoury avait alors son poste de commandement dans la mairie du Raincy ;

Un peu partout, des soldats et leur barda ;

Au centre en bas, un Zouave ;

En bas à droite, sur le vitrail provisoire, une infirmière, dont le visage était celui d’une bienfaitrice de la commune et de l’église, tient une bouteille et verse du liquide dans le quart d’un soldat. Son visage a été remplacé par celui du Curé Nègre, qui ne figurait nulle part ailleurs !

Maurice Denis n’a pas seulement peint les cartons destinés aux vitraux de l’église du Raincy. Il existe également dans l’église Saint Germain de Gagny, d’où sont partis les premiers taxis, une saisissante évocation des combats sous forme d’une fresque intitulée « La Bataille de la Marne ». On y voit Sainte Geneviève et Jeanne d’Arc exhortant les Poilus. Sainte Geneviève n’est-elle pas la patronne de Paris et de Barcy ? là-même où fut érigée Notre-Dame de la Marne selon le vœu de Monseigneur Marbeau si sa ville de Meaux était épargnée. (cf. MAG N° 33) Coïncidence ?

Il est certain que le miracle de la Marne, s’il en est réellement un, a dû entraîner une reconnaissance infinie de la part des populations situées sur le chemin de Barcy à Paris.

Françoise Céréda

Sources :

  • Cconférence de Christophe Arnion, ingénieur ETP, Président de l’Association RESTARER Notre-Dame du Raincy du 24 mars 2024 sur les vitraux 
  • Livret « Centenaire de Notre-Dame de Consolation » édité par la Société Historique du Raincy et du Pays d’Aulnoye
  • Photos : Clément Céréda