Il y a désormais cent-dix années, est porté disparu après des combats intenses. Puis retrouvé prisonnier.

Ecrit par Michel DELMOTTE

Paul René  RENNER est né le 14décembre 1894 à Longwy en Meurthe et Moselle.

La déclaration de naissance est effectuée le 15 décembre par Marie Hélène THIERY  âgée de 32 ans, sagefemme, sa maman, Marcelline Marie BOUTIN  âgée de 21 ans, est repasseuse. Elle est domiciliée à Paris dans le quatrième arrondissement. Son père, Eugène RENNER à 25 ans est garçon de café, il est domicilié également à Paris dans le quatrième arrondissement.

Paul a vu le jour à 11 heures du matin, ainsi qu’en atteste la déclaration a l’état-civil n° 353 de 1894 à Longwy.

Acte de naissance de Paul René
Suite de l’acte de naissance

Les témoins sont Émile MELIN 50 ans gendarme en retraite et Denis Morel 50 ans concierge. 

Engagé au 9éme bataillon de chasseurs à pied,

Paul s ‘engage dans l’armée pour  3 années le 27 mars 1913 à Paris 13éme. Il est affecté au 9éme bataillon  de chasseurs à pied. Le 2 août 1914, la mobilisation générale le maintien dans cette unité.

Il sera caserné à Longwy en 1914, dans la 87eme brigade d’infanterie, il restera d’août 1914à novembre 1918 dans la 4éme division d’infanterie du 2éme corps d’armée.

Il arrive au corps le 5 avril 1913, comme soldat de deuxième classe et est promu caporal le 6 décembre 1913.

Sa fiche matricule

                                                                                                                                                                            

1914 – 1915
Caporal de chasseur à pied

On notera une erreur de transcription sur ce document, en effet, il est indiqué disparu le 17-8-1914 à La Harazée. Or en étudiant le  parcours du régiment, celui-ci, à cette date, se trouve vers Mangienne et Bellefontaine donc dans les environs de Verdun. De plus, le J.O.M. (Journal des opérations militaires) qui est très bien tenu et documenté, pour cette unité, ne mentionne aucune activité combattante ce jour-là.

Paul René est donc disparu à une autre date.

Ayant été prisonnier, nous apprenons par l’avis officiel du 15 avril 1915, et par les fichiers de la Croix Rouge de Genève, (en copie),  qu’il a été pris près de Vienne-le-Château, région où se situe le bois de La Harazée.

Le secteur de La Harazée se situe près de  la Main de Massige un lieu important dans les deuxièmes batailles de la Marne.

Ce bataillon de chasseurs à pied a comme la plus part de ces unités pris une part très active sur le terrain étant fréquemment dans les offensives.

Le 9éme bataillon est présent sur des sites très connus :

  • Sermaize
  • L’Argonne
  • Le Bois de Vaux
  • Fleury et Douaumont à Verdun.

La bataille du 17 décembre 1914.

La Harazée en 1914

      Grâce aux documents de la Croix Rouge, nous avons pu déterminer que Paul est disparu le17décembre 1914. Le bataillon fut confronté à des combats très violents et meurtriers.

Les pertes sont importantes :

  • 9  chasseurs tués
  • Blessés
    • 1 officier
    • 4 sous-officiers
    • 40 chasseurs
  • Disparus
    • 9 officiers
    • 42 sous-officiers
    • 717 chasseurs (dont Paul).

Le constat de disparition figure en page 48  au JMO du 17-12-1914.

Les combats relatés dans le journal des opérations militaires :

17 décembre 1914 A 6h45

Tout le front est violemment bombardé par les minenwerfer, en particulier les 6ème et 4ème Compagnies du 9 ème Bataillon et la 6ème Compagnie du 18ème Bataillon. En même temps, trois mines souterraines font brusquement explosion sous les tranchées de la 4ème Compagnie du 9ème Bataillon qui sont complètement bouleversées. Aussitôt après, les Allemands attaquent en force et font irruption à la fois dans les tranchées de la 4ème Compagnie du 9 ème Bataillon et de la 6ème Compagnie du 18ème Bataillon. Un combat violent s’engage dans les tranchées et boyaux de communication, les sections de réserve des compagnies contre-attaquent l’ennemi à la baïonnette. Mais la 6èe Compagnie du 18ème Bataillon ayant eu sa ligne crevée, l’ennemi fait brusquement irruption dans le ravin du Mortier. Cette compagnie qui se trouvait en bordure du plateau, en contrebas des tranchées ennemies, avait derrière elle les pentes à pic du ravin sur lesquelles il n’avait pas été possible de faire de 2ème ligne. Dès que le Commandant apprend que les Allemands font irruption dans le ravin, il envoie au-devant d’eux pour tâcher de leur barrer le chemin du front la Harazée – Four-de-Paris par où on lui annonçait des renforts, la compagnie du 147ème d’Infanterie, moins une section qu’il avait déjà envoyée en renfort au demi-secteur de gauche. Il est alors 7h30 et les communications téléphoniques sont coupées avec les deux Commandant de demi-secteur. La situation est alors celle qui est indiquée sur le croquis ci-dessous (voir croquis)

Les Allemands se répandant très nombreux dans le ravin, arrivent au P.C. du Commandant de secteur et ils l’obligent à l’évacuer pour ne pas être enlevé, en livrant un combat à bout portant avec les quelques hommes qui l’entourent. Il se retire en combattant, et débordé de tous côtés, dans la direction du P.C. du Commandant du secteur de Saint-Hubert où il retrouve la majeure partie de la compagnie du 147ème d’Infanterie qui a été refoulée de son côté ; nous réussissons à former un barrage sur la crête qui arrête l’ennemi qui nous a suivi. Pendant ce temps, la majeure partie des Allemands qui se trouvaient dans le ravin (deux bataillons d’après les dires d’un Lorrain prisonnier qui a été repris peu après par l’ennemi) remontent les pentes et prennent ainsi à revers toutes les compagnies qui se trouvaient à gauche de la 6ème Compagnie du 18ème Bataillon et avec lesquelles, on ne peut plus communiquer ; celles-ci, assaillies de tous côtés résistent néanmoins ; un certain nombre d’hommes réussissent à se faire jour et à regagner soit le secteur de Saint-Hubert, soit la Harazée ; c’est ainsi que vers 10h30 un groupe d’une quarantaine de Chasseurs ayant à leur tête les Capitaines DUMENIL, FEVRE, DELIVRE, réussit à passer au travers de l’ennemi. A partir de ce moment, le bruit du combat va en diminuant ; ce qui reste des sept compagnies ainsi cernées est tué, blessé ou pris. Seules le 1ère Compagnie du 9ème Bataillon et une section environs de la 6ème Compagnie du 18ème Bataillon ont pu se maintenir sur leurs positions et sont à peu près intactes. Le soir, une centaine d’hommes des autres compagnies peuvent être regroupés. L’attaque a été menée par au moins quatre bataillons ennemis, sans compter les forces qui garnissaient les tranchées allemandes. Nul part, les Chasseurs n’ont lâché pied. Les Allemands n’ont réussi à crever notre ligne qu’après avoir détruit par la mine ou les bombes nos tranchées et ceux qui les occupaient. On avait peut-être pu rétablir la situation si le trou vers la droite de la ligne, qui a permis à l’ennemi d’arriver sur le P.C. et à prendre à revers la majeure partie des compagnies n’avait pas mis celles-ci dans une situation désespérée.

L’absence de Paul René RENNER s’avèrera que celui-ci est prisonnier !

Après cet épisode, les hommes dont on ne trouve plus la trace sont portés disparus.
On découvrira par la suite, le sort des militaires capturés lors des recensements effectués par les services de la Croix Rouge Internationale. Les archives de Genève nous apprennent que :

Paul Renner est identifié sous le numéro 17637

Corp : Corporal soit caporal

9 Jäg Rgt : 9éme régiment de chasseurs

C’est bien lui !

Les deux feuillets de recherches permettent d’identifier :

  • Un premier internement au camp de Giessen, 27 février 1915
  • puis au camp de Munster II en 1916, 22 mars 1916
  • ensuite au camp de Limburg en 1917, 27 décembre 1917.

Un séjour au camp de Giessen

Voici le camp de Giessen qui a une renommée peut attractive !

Le camp de Giessen est situé en Hesse il y avait environ 900 prisonniers, ce camp avait été surnommé par certains : « le camp de la faim »

La photographie ou nous retrouvons Paul René RENNER  a  été prise dans ce camp car on aperçoit la clôture en bois et les arbres en bordure.

Ce qui n’est pas le cas pour les autres camps  où notre chasseur a été transféré.

Paul René RENNER est au premier rang à gauche. Au camp de Giessen.

Le camp Munster II

Ce camp était situé en Westphalie près de la frontière des Pays-Bas. Il était commandé par le Général en chef, Freiher von Bissing un général de cavalerie. Il y avait 3 camps.

  • Le camp 1 dit l’Haus-Spital (Hôpital).
  • Le camp 2 dit Rennbahn (Champ de course), c’est celui où se trouve Paul, il y a 4 baraquement ou « blocks ». Ces sont des baraquements en bois à double cloisons équipés d’électricité. Les hommes ont une paillasse avec deux couvertures, ils disposent d’un lavabo et de bains douches, il y a un chauffage avec poêle dans les chambres. Chaque « block » possède une infirmerie, l’infirmier est français.

Il y avait des représentations de théâtre assuré par les prisonniers et même une fanfare -harmonie des prisonniers.

  • Le camp 3 dit Neue-Kasernen (Nouvelles casernes)
Le camp de Munster
L’harmonie du camp Rennbahn

Le camp de Limburg

Il est situé dans la région de Hesse-Nassau.

Selon les services de contrôle espagnols, ce camp comporte 48 baraques, équipées de poêles, électricité. Les cabinets d’aisances et les cantines sont situés entre les baraques.

Il y avait une chapelle, une salle pour la troupe de théâtre, une bibliothèque de 2000 livres. Un terrain pour le football.

Le camp de Limburg
La cuisine

Le retour.

Paul rentrera dans ses foyers le 6 décembre 1918.

Il se marie le 12 mai 1920, à Paris 3éme arrondissement, avec Lydie Louise MARTIN, il est libraire.

Acte de mariage Paul RENNER et Lydie Martin

Son épouse décède le 25 décembre 1926 à Paris 14éme arrondissement.

Il se remarie le 28 octobre 1927 à Clichy avec Louise Juliette VEDEL. Il entrera dans la police où il exercera la fonction d’inspecteur, dans les renseignements généraux.

Il est décédé le 9 septembre 1959, à La Chapelle-sur-Crécy, en Seine-et-Marne.

Pour terminer : si un lecteur identifie les autres militaires présents au camp de Giessen, ils peuvent nous informer à la SAMGG. Merci !

Merci à Annie pour la photographie de son oncle Paul RENNER.